Burial rites/À la grâce des hommes de Hannah Kent

 

Burial rites de Hannah Kent, Picador 2013
À la grâce des hommes traduit par Karine Reignier, Presses de la cité 2014

Je voulais lire ce livre depuis sa sortie, mais je me disais que ce ne serait pas très intéressant d’en parler puisque la traduction française n’allait pas sortir avant un bon moment. Mais l’autre jour, je surfais sur internet et par hasard, je vois que le livre de Hannah Kent vient de paraître aux Presses de la cité, plus rien ne me retenait. Hannah Kent est australienne et situe son histoire en Islande, pays où j’ai passé des vacances l’année dernière et qui me fascine. Ni une ni deux, j’ai donc sauté sur l’occasion.

À la grâce des hommes est le premier roman de Hannah Kent et il a été récompensé par le prix littéraire australien du manuscrit non publié en 2011. Depuis sa sortie, il a raflé pas moins de cinq prix littéraires et a également été nominé pour de nombreux prix littéraires en Australien et en Angleterre. Bref, un premier roman qui plaît à travers le monde. J’en veux pour preuve la publication en français relativement rapide suite à sa publication en anglais. De plus, un film est déjà prévu pour 2016, avec Jennifer Lawrence dans le rôle titre.

L’histoire : Agnes Magnúsdóttir, servante dans l’Islande austère et violente du XIXe siècle, est condamnée à mort pour l’assassinat de son amant et placée dans une ferme reculée en attendant son exécution. Horrifiés à l’idée d’héberger une meurtrière, le fermier, sa femme et leurs deux filles évitent tout contact avec Agnes, qui leur inspire autant de peur que de dégoût. Seul Tóti, le révérend chargé de préparer la jeune femme à sa fin prochaine, tente de la comprendre. Au fil des mois, Agnes raconte sa vérité, aussi terrible soit-elle à accepter. Mais la justice des hommes est en marche, et pourquoi Agnes réapprendrait-elle à vivre si c’est pour mourir ? Inspiré d’une histoire vraie, À la grâce des hommes est un roman sur la vérité, celle que nous pensons connaître et celle à laquelle nous voulons croire.

J’ai dévoré ce roman ! J’ai été littéralement envoûtée par cette histoire et par l’atmosphère qui s’en dégageait. Je me revoyais marcher sur ses terres sauvages, façonnées par le vent la pluie et le froid. Hannah Kent dépeint avec succès cette histoire vraie, rendant Agnes et le paysage à la fois effrayants et attachants. Jetez-vous dessus !

Cliquez ici pour lire un extrait.

 

 

The rehearsal / La répétition d’Eleanor Catton

The rehearsal d’Eleanor Catton, Granta 2008
La répétition traduit par Erika Abrams, Denoël 2011 ; Folio 2013

Je n’ai, bien entendu, par fait le tour de la littérature australienne, mais quand un auteur de la région pacifique émerge (ici, la Nouvelle-Zélande), il est important d’en parler. Eleanor Catton est donc Canado-Néo Zélandaise et a reçu le Man Booker prize 2013 pour son roman Les luminaires. Ce prix littéraire récompense un auteur originaire de Grande-Bretagne ou d’un pays du Commonwealth et apporte gloire et renommé à celui qui l’emporte. J’avais lu des critiques assez élogieuses sur son deuxième roman Les luminaires, mais j’ai préféré commencer par son premier roman, La répétition dont l’histoire sur fond de théâtre m’a tout de suite séduite.

L’histoire :

Un scandale éclate dans un lycée de jeunes filles : Mr. Saladin, le professeur de musique, est renvoyé pour avoir entretenu des relations coupables avec l’une de ses élèves, Victoria. Les camarades de classe de l’adolescente et sa jeune sœur se confient tour à tour à leur professeur de saxophone. Toutes sont en émoi, comme brusquement propulsées dans un monde de désir, de choix, de fantasmes dont elles pressentent obscurément qu’ils forgent la vie tout entière. Les adultes, englués dans leurs angoisses et leur lâcheté, essaient tant bien que mal d’endiguer l’onde de choc. L’affaire agite les conversations jusqu’à l’obsession et l’école de théâtre locale finit même par l’adapter en pièce de fin d’année, brouillant définitivement les frontières entre réalité et fiction. En cours de saxophone ou sur les planches, les jeunes personnages expérimentent leur propre désir et celui d’autrui. En sortiront-ils indemnes?

J’ai été déstabilisée dès les premières pages car je n’arrivais pas à comprendre où commençait la pièce de théâtre pour laisser la place à la réalité (du roman, bien entendu). Et même après avoir refermé le livre, je ne suis pas sûre d’avoir distingué ce qui était vrai de ce qui était inventé. Eleanor Catton à propos de ce roman « Si j’ai appris quelque chose avec ce livre, confie-t-elle, c’est que les questions que se pose le lecteur au début ne doivent jamais trouver de réponse à la fin. Il faut que ces questions se transforment. Si elles disparaissent, si on y répond ou si elles demeurent telles quelles, cela veut juste dire que le livre n’est pas bon. » Le monde 08/11. Nous sommes spectateurs d’une pièce de théâtre mettant en scène des adolescents qui apprennent à devenir adultes, sans qu’ils sachent réellement comment faire. Ils tâtonnent maladroitement pour trouver leur marque et font face à des situations crues qui les déstabilisent tel que l’érotisme, la manipulation, les tabous de la société. Ils sont partagés entre leur envie de faire partie du monde des adultes, et leurs réflexes enfantins.

J’ai énormément aimé ce livre, je pense même qu’il fait maintenant partie de mon TOP 3 des livres à lire. C’est un roman complexe, finement tissé et incroyablement beau. Pas de fausses notes ni de faux pas, si vous cherchez un roman qui sort des sentiers battus et qui remettra en question vos certitudes, choisissez-le les yeux fermés !

La littérature océanienne

Depuis un mois, je vis (temporairement) en Nouvelle-Calédonie. Je fais un stage de traduction pour le Secrétariat général de la communauté du Pacifique. J’ai donc laissé mes romans australiens pour me pencher sur la littérature océanienne.

Tout comme la littérature australienne, la littérature de Nouvelle-Calédonie et de toutes les autres îles de la région m’est totalement étrangère.

En arrivant ici, je me suis bien entendu penchée sur la question, mais il existe peu de documents de référence et pas beaucoup d’info sur internet.

Les heures italiques - Nicolas Kurtovitch L'Hom Wazo -  Dora Wadrawame Si tu nous regardes - Patrice Guirao

L’auteur qui se détache est Nicolas Kurtovitch, j’ai donc commencé Les Heures Italiques (paru en 2009, Editions Au vent des Iles).

Et c’est ainsi que les hommes vivent. En Nouvelle-Calédonie et ailleurs. Caldoches, Kanaks. Des gens ordinaires liés par la famille ou l’amitié. Des choses extraordinaires ou non tissent la vie : un procès pour meurtre, le travail quotidien, la fatigue, le souvenir amer d’un passage à tabac, une danse, une marche dans la nature, la volupté d’une baignade, l’attente d’un bateau pour emmener l’éternel exilé vers une terre rêvée. Et puis les rêves, les douleurs, les amours, l’entraide, les peurs, ici comme ailleurs. Dans ce beau roman douloureux, Nicolas Kurtovitch plaide pour l’accord entre humains et communautés qui partagent une même terre.

Je suis également en train de lire L’Hom Wazo (Editions Madrépores) de Dora Wadrawane, une jeune auteur de l’île de Maré aux îles Loyauté.

Patou, une jeune femme kanak qui vit dans sa famille, à Maré, apprend que le jeune homme qu’elle fréquente en grand secret est mort brutalement à Nouméa. Cachant sa peine, elle est bientôt prise d’étranges sensations, se sent épiée, suivie. Chaque nuit ses rêves la transportent dans un autre monde et se transforment bien vite en cauchemars. Elle y est poursuivie par un ennemi qu’elle ne peut identifier.
Afin de percer le mystère de cette force inconnue qui semble insidieusement transformer ses nuits et sa vie, elle consulte une vieille guérisseuse qui lui conseille un remède qu’elle se résout à prendre afin d’y voir plus clair.
Mais chaque jour, les signes se font plus précis. Ses questions restent pourtant sans réponse : elle se sent aux prises avec une réalité parallèle. Chaque nuit, Patou devient Manouké, une jeune guerrière conquérante, héritière de la force de son clan, qui n’aspire pourtant qu’à la paix.

Entre rêve et réalité, j’aime beaucoup ce petit roman.

Enfin, pour lire sur les plages de rêves du Caillou, un polar de la collection Noir Pacifique, Si tu nous regardes de Patrice Guirao publié également par la maison d’édition Au vent des îles. Patrice Guirao est un auteur de Polynésie.

Ils sont tous là, Toti, Sando, Al, Mamie Gyani, les autres… et quelques cadavres. Les héros de Crois-le ! et Lyao-ly se retrouvent dans ce troisième opus pour résoudre une double enquête qui s’annonce compliquée et dangereuse pour AL. Le ton y est toujours aussi décalé. La carte postale, déjà bien froissée dans les deux premiers volumes, est renvoyée au rang de carton d’invitation. Et une invitation, ça ne se refuse pas ! Surtout quand il s’agit de pénétrer au cœur d’un pays riche de sa joie de vivre, de ses spécificités cachées, de sa population multi ethnique attachante et de ce melting pot de vies colorées. Le tout sans bouger de son fauteuil ou pour les plus chanceux les pieds en éventail dans un transat sous un badamier. Dans Si tu nous regardes Tahiti devient, sous la plume de l’auteur, une île d’aventure, une auberge espagnole où chacun apporte son repas pour le partager avec l’étranger qui vient y poser ses valises. Même si parfois il faut se méfier des plats qu’on ne connaît pas…

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